Shems Bendali a marqué de son empreinte le Cully Jazz Festival 2019. Le jeune prodige, qui a des projets plein la besace, se raconte.
Au Chapiteau avec son quintet, sur la scène extérieure de l’openjazz au centre avec Brass le Band ou encore au caveau Mélanie Weber avec Jah Jazz Ochestra: les sons de la trompette de Shems Bendali ont résonné un peu partout cette année dans un Cully Jazz Festival que le talentueux musicien, du haut de ses presque 23 ans (il les fêtera le 27 avril), arpente depuis déjà plusieurs années. D’ailleurs, les bords du Léman, il les connaît bien, lui qui est né et a grandi à Thonon-les-Bains, sur la rive française du lac.
Fils de parents d’origine algérienne – sa maman est de Constantine et son papa d’Alger – qui n’étaient pas musiciens eux-mêmes, c’est un peu à reculons que Shems est entré dans le monde de la musique. «C’est cliché, mais quand tu es un garçon rebeu d’origine, l’intégration passe avant tout par le football, plaisante le jeune homme. Et tout comme mes deux frères, j’en ai fait.» Mais lorsqu’il a 8 ans, sa mère le pousse à jouer d’un instrument. Il choisit la trompette. «C’était peut-être aussi par souci d’intégration de sa part, relève-t-il. Et franchement, au début, je n’aimais pas la musique. Puis à 12 ans, j’ai eu le déclic.» A ce moment-là, Madame Bendali inscrit son fils à un cours d’une semaine avec le trompettiste Jeff Baud, pour ce qui était presque une tentative de la dernière chance. «Elle et moi, on avait plus ou moins convenu que si ça n’accrochait pas après ce stage, j’aurais pu arrêter, raconte le Thonanais. Je me souviens de la scène. On était plusieurs jeunes alignés face à ce mec. Il a joué un truc puis annoncé qu’on allait bosser là-dessus. J’ai été immédiatement impressionné et je me suis dit que je voulais faire sonner mon instrument comme lui.»
Un agenda bien chargé
A partir de là, Shems commence à écouter beaucoup plus de jazz. Et du hip hop aussi. Et surtout à fréquenter les jams organisées dans un bar de se ville. Puis, à 14 ans, il devient l’élève de Jeff Baud. «Ce type est mon premier mentor», confie-t-il. En 2014, à l’âge de 18 ans, arrive le moment où le trompettiste prodige doit choisir une école où poursuivre ses études. «Je n’avais vraiment pas envie d’aller à Paris, admet-il. Et puis, la HEMU (ndlr: Haute Ecole de musique de Lausanne) était là, juste de l’autre côté du lac. Cela me permettait de rester assez près de mes parents. Et eux pouvaient ainsi venir me voir en concert.» Grâce aux conseils avisés de Jeff Baud, celui que la critique musicale considère comme l’un des meilleurs espoirs de sa génération réussit son Bachelor en 2 ans (au lieu de 3). Puis, en juin 2018, il obtient son Master en interprétation musicale avec, à la clé, le Prix Mentorat du Cully Jazz Festival, qui lui permettra de se rendre à Brême pour le Jazzahead, l’un des haut-lieux de l’industrie du jazz, à la fin de ce mois d’avril, accompagné par Jean-Yves Cavin, directeur artistique du CJF.
Et juste après son escapade dans le Nord de l’Allemagne, Shems se rendra à la Maison de la Radio à Paris. «Je participe à un projet théâtral avec le rappeur Sofiane Zermani, aussi connu par son blase Fianso, précise-t-il. Il s’agit de la pièce Le Magnifique, adaptée du roman Gatsby le Magnifique de Francis Scott Fitzgerald, sur laquelle il y a un accompagnement musical. On l’a déjà jouée l’été dernier au festival d’Avignon.» Là, les représentations sont programmées pour les 2 et 3 mai. Et outre ses nombreuses collaborations, comme avec la chanteuse zurichoise Lea Lou avec qui ils ont accompagné le Britannique Charlie Winston à Vienne et Salzbourg en décembre dernier, le diplômé de l’HEMU vient également de fêter, le 15 mars, la sortie de Choukheads, son premier album présenté mercredi 10 avril sur la scène du Chapiteau avec son quintet composé d’Arthur Donnot (saxophone), Andrew Audiger (piano), Marton Kiss (batterie) et Yves Marcotte (contrebasse). En voilà un qui a décidé de ne pas chômer en ce début d’année 2019!