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Pour une dernière, on commence tôt, très tôt. Si tôt que certains se les sont servis en réveil tonitruant, tonnant, entonnant, étonnant. Traktorkestar de bonne heure c’est tous les jus d’orange du monde, c’est du muesli de première, breakfast for champions. Partis avec un joli cadeau comme ça au saut du lit, le reste était plutôt bien emmanché.

Mais bon lui par contre, je le laisse aller tout seul. Je l’attendais un peu, cet unique piano solo du festival, mais mes neurones ont raté le rendez-vous. Juste le temps de cette réflexion: un solo c’est un peu du voyeurisme, comme si on pénétrait la personnalité du musicien au plus proche et au plus juste. Pas de fioriture, pas de protection, pas de déviation. On tâte de ses organes, de ses doigts, de ses pensées, un peu de son univers. Le sien est résolument positif et tourné vers l’avant, confiant et heureux de son second épanchement tout nu. C’est chargé, mais pas surchargé, c’est un peu à l’image de ce rappel qui fait un honneur à un Duke de 47, quand tout partait aux fraises mais que la musique surnageait, comme elle l’a toujours fait. Laissons ça tranquille.

Ensuite, ça devient un peu trouble. Les genoux ne suivent plus, le tempo s’accélère, l’ubiquité fait encore et toujours défaut. Ce jeune fou, sur scène, il n’est plus tant fou. Il m’arrache des larmes en trois notes à son arrivée sur scène, puis parvient à me lasser en trois morceaux. Mon collier magnétique au fond de ma poche me force à l’écouter d’une oreille distraite, et mon pouls de grande dernière va plus vite que ses ballades électrifiées.

Le Sacre, c’est le coup de vieux. Carine nous lâche la date en apéro, et ça reste en travers la gorge: 2006. Six ans qu’on écoute ce génie, six ans qu’on n’oublie jamais ses albums pour un seul voyage, trajet, train, avion. Alors ce rendez-vous là on s’y préparait depuis six ans, six mois, et on ne l’a pas raté. Seulement, c’est un peu sage tout ça messieurs. Bien, très bien joué, du panaché grand cru, avec même un bon Bonimenteurs qu’on attendait pas, du coup sans pouvoir s’empêcher de penser au calendrier politique de l’hexagone, ça colle. Mais diable, pas de rigolade, peu d’oeillades, presque pas de parlote, c’était pas comme ça dans ma tête, depuis six ans. Las, la musique reste sublime, on est là pour ça après tout.

Un petit silence radio plus tard, la belle verte. Ça se mérite, et ça se déguste. Même quand la ferraille lâche dans les premières mesures, le groove surplombe tout, et c’est comme ça depuis deux décennies. Non mais t’imagines ça ? 20 ans à 3, tu vois un peu la qualité des question-réponses ? C’est génial, point barre. Un peu comme ce festival, tiens.

Posté par Bureau
dimanche 22 avril 2012
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